Bitcoin: quand le vent tourne en politique
J’ai commencé à vulgariser les cryptomonnaies en 2016, je n'aurais jamais imaginé écrire un jour un article sur les positions respectives des candidats américains à la présidentielle concernant cette classe d'actifs. L’évolution de leurs positions respectives en dit long sur la place que Bitcoin se fait.
Revenons sur les récentes évolutions, car il est vrai que les candidats n'ont pas toujours été favorables ni même intéressés par les cryptomonnaies. Bien au contraire.
Les deux candidats à la présidentielle, Joe Biden et Donald Trump, se sont par le passé montrés plutôt hostiles envers les cryptomonnaies.
Nous pouvons notamment citer l'intervention de Donald Trump au sujet du Bitcoin en 2018 : "Je n'aime pas le Bitcoin. Je n'aime que le dollar".
Du côté démocrate, le secteur crypto a fait l'objet de nombreux procès intentés par la SEC, le gendarme des marchés financiers, sous la direction de Gary Gensler.
Les positions des deux candidats ont bien évolué.
La question qu'on peut légitimement se poser est : pourquoi ont-ils changé leur fusil d'épaule ?
Depuis plusieurs années maintenant, un acteur se démarque particulièrement sur la scène du lobbying crypto américain : l'exchange Coinbase. Son PDG, Brian Armstrong, et son directeur juridique, Paul Grewal, ont intensifié leurs apparitions médiatiques, les différentes études menées et les contre-attaques face au régulateur.
Une étude en particulier semble avoir résonné à travers l'écosystème crypto américain : The State of Crypto: Age, Access, and Agency
Intitulée “The State of Crypto: Age, Access and Agency", elle a été publiée en octobre 2023 par Coinbase. Son objectif était de souligner l'importance pour les électeurs américains d'avoir un candidat ouvert et favorable aux cryptomonnaies. Une première étape pour montrer que ce secteur n'est plus une niche, comme beaucoup ont tendance à le croire. L'aspect communautaire, très présent dans l'univers crypto, a d'autant plus amplifié l'impact de cette étude.
Un deuxième phénomène semble avoir contribué à changer la perception des cryptomonnaies par le gouvernement américain : l'approbation, en janvier, des ETF Spot sur Bitcoin pour 11 institutions américaines. Pour de nombreux observateurs, cela soulignait une fois de plus l'importance de cette classe d’actifs pour des géants comme Blackrock ou Fidelity.
Quelques mois après ces évolutions. Les campagnes présidentielles s'accélèrent et Donald Trump, certainement encore très satisfait de sa deuxième collection de NFTs basée sur sa photo en prison, fait une série d'annonces.
Concrètement :
- Il accueille les détenteurs de ses NFTs à Mar-a-Lago pour un dîner prestigieux, en faisant la promesse de stimuler l'innovation et de protéger les cryptomonnaies. Lors de cet événement, des personnalités importantes du secteur, comme Ryan Selkis, fondateur et PDG de Messari, ou encore Mihailo Bjelic, fondateur de Polygon, sont invités à prendre la parole.
- Le candidat républicain accepte désormais les dons en crypto pour sa campagne électorale.
- Il souhaiterait également que tous les bitcoins restants à miner soient produits aux États-Unis (aussi irréalisable que cela puisse paraître).
Dans le camp Biden, ces annonces de Donald Trump ne passent pas inaperçues et l'ambiance semble prendre un tout autre tournant.
Après l'approbation des ETF Spot sur Bitcoin, tout le monde pensait que celle qui concernait l’Ether serait plus complexe à obtenir. Alors que la SEC peinait à répondre aux demandes des différents acteurs depuis plusieurs mois, l'autorité a finalement demandé à tous les institutionnels ayant déposé leur application d'y apporter des modifications de manière urgente, 24 heures avant la date limite fixée. Dès le lendemain, les ETF Spot sur Ethereum étaient approuvés.
La SEC se trouve dans une position délicate, confrontée à la pression du gouvernement démocrate qui, en retard par rapport à leurs rivaux républicains, les pousse à se conformer à certaines demandes selon les analystes Bloomberg.
Certes, le rôle principal de la SEC est d’être une agence indépendante pour protéger les investisseurs sur le sol américain. Il est cependant important de noter que ce rôle peut parfois être biaisé et devenir le reflet de la politique du gouvernement actuel.
Il est également important de préciser que la SEC ne représente pas l’ensemble de la vision démocrate. Et pour illustrer ce propos, nous pouvons parler de l’ “Armée anti-crypto” de la Sénatrice Warren que cette dernière a souhaité monter à la suite de la faillite de FTX. Cette position forte qui se confirme par 83 positions anti-crypto semble également changer, selon l’initiative Stand with Crypto de Coinbase).
En effet, en 2024 la sénatrice a déclaré “vouloir collaborer avec les acteurs de l’industrie à condition que ces derniers suivent les règles de la finance traditionnelle.”
Depuis, plusieurs actualités montrent le “nouveau” positionnement du président Joe Biden vis-à-vis des cryptomonnaies et s’éloigne de l’image que portaient les démocrates il y a peu.
Par exemple, l'équipe de réélection du président Biden serait actuellement en discussion avec Coinbase Commerce pour accepter les dons en cryptomonnaies pour sa campagne.
Il y a quelques jours seulement, la SEC a abandonné son procès contre Consensys. Cette dernière cherchait à démontrer que l’Ether était un titre financier et ne devrait pas être proposé sur le territoire américain.
Une vague de changements semble donc se dessiner. Deux camps politiques s'opposent désormais sur la question des cryptomonnaies, un sujet central dans la course à la Maison Blanche.
Une chose est désormais certaine, les différentes études et sondages prouvent qu'une grande partie des Américains sont toujours pour, ou du moins n'ont rien contre le développement des cryptomonnaies. Le risque a changé de camp. C'est aujourd'hui le fait de ne pas considérer, comprendre et vouloir d'un monde épousant la blockchain qui serait mal perçu par les électeurs. Ce changement de perception pousse les politiques à réaliser des pivots au sujet de notre secteur. De nombreuses autres annonces devraient avoir lieu avant l'élection qui se tiendra au mois d'octobre 2024. Naturellement, je vous en tiendrai informés.