Qu’est-ce que la Finance Décentralisée (DeFi) | Comprendre et l'utiliser

La finance décentralisée regroupe un ensemble d’applications développées sur la blockchain pour reproduire des services financiers traditionnels tels que les prêts, les emprunts et autres formes d’investissement de manière décentralisée, c'est-à-dire sans dépendre d'un tiers de confiance. La finance décentralisée (DeFi) propose une alternative à la finance centralisée (CeFi) et à la finance traditionnelle (TradFi), avec un système plus inclusif qui permet à tout un chacun d’accéder à des services financiers, contrairement au système bancaire et aux institutions actuels. Voici en détail ce qu’est la finance décentralisée (DeFi), ses différents cas d’usage de plus en plus adoptés, et comment en profiter.

Qu’est-ce que la finance décentralisée (DeFi) ? 

L'histoire derrière la création de la finance décentralisée 

La finance décentralisée (DeFi) est née suite à la création de la blockchain Ethereum en 2015 par Vitalik Buterin qui souhaitait développer plus de cas d'usage que ce qui n'était possible sur la blockchain Bitcoin consacrée à l'échange de monnaie de pair-à-pair, sans intermédiaire. En effet, la finance décentralisée permet de réaliser des opérations plus complexes, notamment pour générer des intérêts et des rendements sur ses cryptomonnaies. 

La DeFi a été créée comme une alternative au système financier traditionnel ralenti par les nombreuses démarches administratives à la fois chronophages et coûteuses qui empêchent tout un chacun de disposer de ses fonds librement. La finance décentralisée se veut également moins discriminante que le système financier traditionnel dont l'accès est systématiquement conditionné par la classe sociale, la situation professionnelle, personnelle ou encore par la localisation géographique des individus.

La finance décentralisée s’est développée en 2017, avant d'être de plus en plus adoptée à partir de 2019, jusqu'à atteindre un pic lors du DeFi Summer 2020, période où l’adoption de la DeFi s’est grandement accélérée avec la création de nombreux protocoles et la découverte de stratégies de rendements jamais vues auparavant. La valeur totale verrouillée des protocoles (Total Value Locked - TVL) a atteint jusqu'à 250 milliards de dollars en décembre 2021.

💡 La TVL (Total Value Locked) désigne la valeur totale verrouillée au sein d'une application, c'est-à-dire l'intégralité des fonds que les utilisateurs ont immobilisé afin de l'utiliser. La TVL est un indicateur de popularité d'un protocole blockchain et de la confiance que lui accordent les utilisateurs. Vous pouvez trouver la TVL d'un protocole sur des sites comme DefiLlama ou Dune.


Définition de la finance décentralisée

La finance décentralisée est un système financier développé sur la blockchain afin de réaliser des transactions financières de façon décentralisée, c'est-à-dire sans s'en remettre à des tiers de confiance comme les institutions bancaires de la finance traditionnelle.

En effet, les applications décentralisées étant créées sur la blockchain, elles fonctionnent sur un réseau d'ordinateurs répartis dans le monde, si bien qu'une seule personne ou entité ne peut décider de l'interrompre. La désintermédiation qui caractérise la DeFi permet de réaliser soi-même les transactions jusqu’alors confiées aux banques, et donc d’éviter les limites de ces dernières, mais également les délais et les frais de transaction élevés, entre autres. Aussi, la DeFi est non seulement ouverte à tous sans permission, mais aussi accessible 24h/24h 7j/7j, permettant aux utilisateurs d’accéder à leurs fonds en permanence, et non uniquement les jours ouvrés. 


Qu’est-ce qu’un protocole DeFi ? 

Un protocole DeFi est une application décentralisée (dApp) développée sur la blockchain, qui se présente sous la forme d'un site Internet classique, auquel les utilisateurs se connectent via un portefeuille crypto. Un protocole DeFi est décentralisé et développé à l'aide de smart contracts, c'est-à-dire des protocoles informatiques autonomes dont le code s’exécute automatiquement lorsque les conditions inscrites sont respectées, ce qui permet de se passer de tiers de confiance.  

🔐 Tout comprendre sur les portefeuilles crypto ou « wallets »

Au sein des protocoles DeFi, des Organisations Autonome Décentralisée (Decentralized Autonomous Organization - DAO) permettent aux créateurs de l'application et aux utilisateurs de se regrouper afin de proposer et de voter des mises à jour du protocole. Le but d'une DAO est de respecter la décentralisation en donnant un droit de vote aux utilisateurs qui possèdent des tokens de gouvernance du protocole afin que chacun participe de manière équitable à son évolution. 

Par exemple, Uniswap, la plateforme d'échange de cryptomonnaies décentralisée (DEX) leader sur la blockchain Ethereum et les blockchains compatibles avec l'Ethereum Virtual Machine (EVM-compatibles) a une DAO à laquelle les détenteurs de la cryptomonnaie UNI peuvent participer. Ainsi, les mises à jour comme Uniswap V2, V3, V4 et UniswapX ont été implémentées en tenant compte de l'avis des utilisateurs.


Comment fonctionne la finance décentralisée ? 

La finance décentralisée fonctionne sur la technologie blockchain sur laquelle sont construites des applications auxquelles tout le monde peut se connecter via un portefeuille crypto aussi appelé « wallet » qui permet à la fois d'accéder à ses cryptomonnaies et de se connecter à la blockchain. 

Les protocoles nécessaires au bon fonctionnement de la DeFi

Les oracles

Bien qu'elle soit développée sur la blockchain, la finance décentralisée n'est pas décorelée du monde réel. Alors, pour proposer des services financiers équivalents à ceux de la finance traditionnelle, les protocoles DeFi doivent accéder aux données financières présentes en dehors de la blockchain (off-chain), notamment sur Internet, mais également aux données on-chain d'autres protocoles. Pour accéder à ces données, les protocoles DeFi utilisent des oracles qui, comme leur nom l'indique, consultent des données afin de les transmettre aux smart contracts des protocoles.

Chainlink (LINK) est l'oracle leader depuis sa création en 2017, utilisé par Ethereum et les blockchain EVM-compatibles, mais également par les blockchains Avalanche et Solana particulièrement utilisées en DeFi, pour ne citer qu'elles.

Les bridges

Vous l'aurez compris, il existe de nombreuses blockchains, et chacune fonctionnant sur son propre réseau, elles ne sont pas toutes compatibles entre elles. Par exemple, 1 ETH détenu sur la blockchain Ethereum ne peut pas être envoyé et utilisé tel quel sur la blockchain Avalanche. Or, le manque d'intéropérabilité entre les blockchains est une limite majeure qui complexifie l'expérience utilisateur et amoindrie l'efficience du capital.

Des solutions ont donc été développées afin de palier au manque d'interopérabilité entre les blockchains : les bridges. Comme leur nom l'indique, les bridges sont des ponts qui relient les blockchains entre elles et permettent à un utilisateur de transférer 1 ETH actuellement sur la blockchain Ethereum vers la blockchain Avalanche.

Les bridges sont nécessaires au bon fonctionnement de la finance décentralisée, car la plupart des protocoles étant disponibles sur différentes blockchains, il est nécessaire de pouvoir transférer ses cryptos entre ces dernières. Certaines blockchains ont des bridges natifs, c'est-à-dire propres à leur réseau, mais certains bridges supportent également plusieurs blockchains.

Les oracles et les bridges sont donc deux clés de voûte de la finance décentralisée. Voyons désormais les principaux cas d'usage de la DeFi, ainsi que les protocoles phares pour chacun d'entre eux.


Les principaux cas d'usage de la finance décentralisée

La DeFi permet de nombreux cas d'usage auxquels sont consacrés différents types de protocoles, notamment :

  • Les plateformes d’échange décentralisées (DEX) pour acheter, vendre et échanger ses cryptomonnaies directement sur la blockchain ;
  • Les plateformes de trading de cryptomonnaies décentralisées, pour placer des ordres avec des effets de levier, trader différents produits financiers, etc.
  • Les protocoles de liquid staking pour sécuriser une blockchain en l’échange de rendements ;
  • Les protocoles de lending / borrowing (prêt / emprunt) ;
  • Le yield-farming pour optimiser des stratégies de rendement et maximiser ses gains.


Uniswap (UNI) : l’exchange décentralisée le plus utilisé de la DeFi

Uniswap est une plateforme d’échange décentralisée (DEX) créée en 2018 sur la blockchain Ethereum pour échanger ou « swapper » des cryptomonnaies entre elles. Uniswap fonctionne grâce à un Automated Market Maker (AMM) qui permet aux utilisateurs de déposer leurs cryptos dans des pools de liquidité (Liquidity Pools - LP), lesquels permettent aux utilisateurs d'exécuter leurs transactions sans nécessiter un vendeur en face comme c'est le cas sur un carnet d'ordre. Les fournisseurs de liquidité sont quant à eux rémunérés par les frais de transaction des utilisateurs. Depuis sa création, Uniswap conserve sa position de leader sur les blockchains compatibles avec la blockchain Ethereum et ne cesse d'évoluer.



dYdX (DYDX) : la première plateforme de trading décentralisée

dYdX est une plateforme de trading décentralisée qui permet d'échanger des cryptomonnaies ainsi que des produits dérivés tels que des contrats perpétuels, par exemple. Les plateformes de trading décentralisées permettent de parier à la hausse ou à la baisse d'un actif, notamment en utilisant des effets de levier, et ce, directement sur la blockchain.

Le trading est extrêmement risqué et les effets de levier doivent être maniés avec la plus grande précaution, car ces derniers multiplient aussi bien le potentiel de le gain que le risque de perte. Tout investissement comporte des risques de perte en capital. N'investissez que ce que vous êtes prêt à perdre.


Lido : le leader du liquid staking

Lido est un protocole DeFi consacré au liquid staking d'ETH qui permet à tout utilisateur de déléguer ses cryptos ETH à des validateurs afin de participer à la sécurité de la blockchain tout en générant des rendements. Le liquid staking est d'autant plus intéressant qu'il permet d'obtenir un token représentant le total d'ETH verrouillé, dans le cas de Lido le stETH, qui peut à son tour être utilisé dans d'autres protocoles DeFi, permettant une plus grande efficience du capital.


Aave (AAVE) : le protocole de prêt / emprunt numéro 1

Aave est un protocole de lending / borrowing (prêt / emprunt) qui permet de déposer des cryptomonnaies en collatéral afin d'obtenir une capacité d'emprunt et donc de contracter un prêt directement sur la blockchain. Aave permet également de déposer des cryptos sans réaliser d'emprunt, afin de fournir de la liquidité et d'être rémunéré par les intérêt payés par les emprunteurs.

Le lending / borrowing sur la blockchain est inspiré du système du crédit Lombard qui permet de contracter un emprunt à condition de mettre en gage un actif en regard, cet actif étant saisi par le protocole si l'emprunteur venait à faire défaut, afin que celui-ci ne subisse pas de mauvaise dette et que le prêteur soit remboursé. Sur Aave comme sur d'autres protocoles, chaque utilisateur a un « Health ratio » qui permet d'évaluer son risque de liquidation et ainsi d'ajuster sa position en fonction.


Yearn Finance (YFI) : le premier protocole de yield-farming 

Yearn Finance est le plus ancien yield optimizer, un protocole qui permet d'optimiser ses rendements. En effet, le yield-farming consiste à « cultiver », c'est-à-dire à accumuler les stratégies de rendement sophistiquées de plusieurs protocoles, en profitant de la compatibilité caractéristiques des applications décentralisées, et ce depuis une seule et même plateforme, à travers des vaults. Le yield farming est toutefois particulièrement risqué, car le potentiel de rendements est proportionnel à l'accumulation des risques qu'entraîne la superposition des différents protocoles.


Comment investir dans la DeFi ? 

Vous l'aurez compris, l'investissement est la raison d'être même de la DeFi. Ainsi, la première façon d'investir dans la finance décentralisée consiste à utiliser différents protocoles dans lesquels placer ses cryptomonnaies afin de les faire travailler et de bénéficier de rendements à travers le staking, les prêts / emprunts, l'apport de liquidité ou le yield farming.

Ces protocoles nécessitant une certaine agilité et beaucoup de précautions, il est également possible d'investir dans la DeFi de manière indirecte, en achetant les cryptomonnaies natives des différents protocoles, afin de profiter de leur potentielle prise de valeur. Bien qu'associée à des espérances de gain moins exponentiels, cette alternative permet également de réduire l'exposition aux risques inhérents aux protocoles de finance décentralisée (impermanent loss, hack, rugpull, etc.). 


Quels sont les risques de la finance décentralisée ? 

En finance décentralisée comme en finance traditionnelle, les espérances de gains s'accompagnent de risque, et le ratio rendement / risque est toujours corrélé. Voici 4 risques majeurs en DeFi :

  • Les risques technologiques : aussi révolutionnaires soient-ils, les protocoles DeFi sont complexes et leur degré de sophistication laisse également place à de potentielles failles exploitables par les hackeurs particulièrement intéressés par les sommes colossales en circulation.
  • Les pertes impermanentes (impermanent loss) : ce risque de perte de capital est encouru par les fournisseurs de liquidité, lorsque ces derniers déposent leur capital dans des pools. En effet, prenons l'exemple d'un pool composé de 50 % de BTC et 50 % d'USDC. Si le prix du BTC augmente, le protocole procédera à un rééquilibrage du pool, afin que la parité soit respectée. Ainsi, l'utilisateur qui a immobilisé ses BTC essui un manque à gagner potentiellement considérable, voire une perte s'il décide de retirer ses BTC. Il est donc primordial d'être attentif au cours des cryptos que l'on dépose dans les protocoles.
  • L'absence de protection des utilisateurs : la liberté que permet la DeFi par rapport à la TradFi implique de grandes responsabilités, d'autant que contrairement aux solutions bancaires couvertes par les États ou par les assurances, les protocoles DeFi, eux n'ont pas de solution optimale pour protéger le capital de leurs utilisateurs. Certaines solutions existent comme le fonds de sécurité du protocole Aave ou des protocoles d'assurances décentralisés, toutefois ces solutions restent minimes par rapport aux risques encourus.
  • Le manque de régulation : le propre de la DeFi étant d'être décentralisée, celle-ci est jusqu'alors exempte des régulations appliquées aux plateformes d'échange centralisées (CEX). L'absence de régulation en DeFi est souhaitable selon certains utilisateurs qui souhaitent justement profiter de la non-intervention des États, toutefois celle-ci représente également un frein pour de nombreux investisseurs qui redoutent ce flou ainsi que le manque de clarté quant aux questions fiscales.


Pour se protéger de ces risques, il est bien entendu bon de rappeler que tout investisseur ne doit investir que ce qu'il est prêt à perdre. Aussi, certaines bonnes pratiques permettent de se prémunir des risques inhérents aux protocoles DeFi, notamment :

  • Éviter d'allouer des sommes importantes dans des protocoles avec une faible valeur total verrouillée (TVL), indicateur qu'une application est jeune et peu ne pas être digne de confiance.
  • Toujours vérifier que l'url du protocole auquel vous vous connectez est l'url officielle, puis l'enregistrer en favoris afin de ne pas vous tromper à l'avenir ;
  • Ne jamais interagir avec une adresse, un token ou un NFT présent dans votre portefeuille alors que vous ne l'avez jamais acheté ou sollicité ;
  • Ne jamais cliquer sur un lien non-sollicité ;
  • Révoquer régulièrement les autorisations de portefeuille réalisées sur les protocoles, notamment via Revoke cash afin de ne plus y être connecté en cas de hack ;
  • Rester attentif au cours des cryptomonnaies déposées en collatéral, afin d'éviter les liquidations. Astuce : des protocoles comme DeFi Saver permettent de planifier des actions de vente ou d'achat à certains seuils de prix, afin d'éviter les liquidations.
  • Ne jamais partager la clé privée ni la seed phrase de son portefeuille.


La finance décentralisée : ce qu'il faut retenir

La DeFi reproduit des services financiers jusqu'alors réservés aux institutions bancaires sur la blockchain, permettant à des personnes exclues par le système traditionnel d'y accéder, et parfois de profiter de rendements plus importants. Toutefois, la finance décentralisée n'est pas encore totalement apte à tenir cette promesse d'accessibilité, principalement à cause de sa complexité technique. En effet, bien que théoriquement accessible à tous grâce à la technologie blockchain qui la sous-tend, en pratique, la DeFi reste complexe à maîtriser et nécessite de réaliser des compromis en termes de sécurité que la plupart des investisseurs ne souhaitent pas encourir.

Toujours est-il, comme toute nouvelle technologie en phase de développement, la DeFi continue de proposer des cas d'usage de plus en plus optimisés afin de se rapprocher de ses objectifs et de permettre un véritable changement de paradigme. Celui-ci s'observe notamment via le rapprochement entre DeFi et TradFi qui ne sont plus systématiquement opposés. En effet, l'avènement des actifs du monde réel comme des produits financiers tels que les options ou les obligations sur la blockchain grâce à la tokenisation semble laisser entrevoir une complémentarité, plutôt qu'un remplacement quant à lui difficilement envisageable. La DeFi propose donc une alternative permettant à chacun de disposer librement de son capital. Des solutions visant à améliorer l'expérience utilisateur et à le protéger sont attendues pour réduire les frictions et permettre un passage à l'échelle plus important.